dimanche 19 mars 2017

De la paresse sur fond de travail

Kazimir Malevitch (1878-1935) est plus connu comme peintre que comme écrivain. Sa doctrine picturale - le suprématisme" - l'a conduit d'une étape de la couleur à une étape du noir puis à une autre blanche, son oeuvre de peintre aboutissant au fameux "carré blanc sur fond blanc" en 1918. Il a mis en mot sa doctrine du "Suprématisme ou le Monde sans objet" (1927).
Ici, un extrait d'un texte de Malevitch sur "La paresse comme vérité effective de l'homme" (Ed. Allia, 14ème éd., 2015).

 

"Le système socialiste développera davantage encore la machine, c'est là tout son sens. Son sens consiste à libérer le plus possible la main d’œuvre du travail, en d'autres termes, de faire de tout le peuple travailleur ou toute l'humanité un maître aussi oisif que le capitaliste qui reporte sur les mains du peuple tous ses cals et tout son travail. L'humanité socialiste reportera ses cals et sa sueur sur les muscles des machines et garantira aux machines un travail illimité, qui ne leur laissera pas une minute de répit. Dans l'avenir, la machine devra se libérer et reporter son travail sur un autre être, se débarrassant du fardeau de la société socialiste, se garantissant elle aussi le droit à la "paresse".
Ainsi, donc, tout ce qu'il y a de vivant tend à la paresse. D'autre part, la paresse est l'aiguillon principal pour le travail, car c'est seulement par le travail qu'on peut l'atteindre, ainsi est-il évident que l'homme est tombé, avec le travail, sous le coup d'une sorte de malédiction, comme si auparavant, il se trouvait constamment en état de paresse. Peut-être, dans la communauté humaine, un tel état a-t-il réellement existé et peut-être la légende de la création du paradis et de l'homme chassé de celui-ci est-elle une représentation trouble d'une réalité passée, à moins qu'il ne s'agisse de l'image d'une réalité future à laquelle l'homme parviendra à travers la malédiction du travail".

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